Une manifestation « contre l’État d’Urgence et la COP 21 » était organisée vendredi 4 décembre au soir à Nantes. Il s’agissait avant tout de ne pas abandonner la rue après l’interdiction de la manifestation parisienne, et de protester contre les assignations à résidences de militants et les perquisitions administratives qui ciblent ouvertement des personnes de confession musulmane. Le rassemblement devait également permettre un temps d’échange, afin de rompre l’isolement et la peur.
Peu après 18H, le petit rassemblement prend forme, une banderole « ni COP 21 ni État d’Urgence, Résistance » est déployée. Quelques prises de paroles se succèdent, pour faire le point sur le climat sécuritaire actuel. La police n’est pas visible, l’ambiance est calme.
Autour de 18H45, le petit cortège d’environ 150 personnes s’élance en craquant quelques fumigènes. Des gens de tous ages sont présents dans la manifestation. Pour certains, c’est la première manif. Les visages ne sont pas masqués, l’ambiance n’est clairement pas à l’offensive, ni au conflit. Le slogan « État d’Urgence, État policier, ils ne nous enlèveront pas, le droit de manifester » est repris en cœur.
Au bout d’une centaine de mètre à peine, le cortège croise une voiture et des motos de la police municipale. Suit un échange confus. Hués, les policiers municipaux font très vite et massivement usage de bombonnes de gaz lacrymogènes et de matraques sur une partie des manifestants.
La scène qui suit est ahurissante. C’est un véritable déchainement de violences policières. Tout se passe en moins de 5 minutes.
Une brigade de la BAC surgit au cœur du cortège, matraques en avant. Ces policiers en civil étaient donc cachés à l’arrière du groupe depuis le début. Un manifestant est plaqué au sol et tabassé, alors qu’une femme cinquantenaire qui crie « pas de violence ! » est elle aussi jetée au sol par les policiers et projetée contre une vitre des galeries Lafayette. Elles reçoit quelques coups. Le manifestant interpellé est copieusement frappé au sol. Il est jeté dans la voiture de police municipale, le visage brulé par les gaz et tordu de douleur.
Les flics continuent à vider en l’air leurs gazeuses lacrymogènes pour saturer la rue de spray irritant, alors mêmes que les manifestants sont à plus de dix mètres d’eux. L’air est irrespirable.
Des camions de police arrivent immédiatement. Le grand chef de la police – le Directeur Départemental de la Sécurité Publique – est présent au milieu de ses hommes. L’attaque était donc préméditée. Il lâche la charge. Hallucinante. Des policier en armures, casques et bouclier courent à toute vitesse, hurlant, dans une confusion totale, frappant tout-e-s celles et ceux qui passent à leur portée. Un couple de passants reçoit des coups, des client attablés à une terrasse sont effrayés.
Une manifestante qui tenait la banderole témoigne :
« Je tenais la banderole, un flic en uniforme s’est avancé matraque levée en criant. J’ai reculé toujours en tenant la banderole mais sans lui tourner le dos. Il a envoyé des coups de matraque qui ne m’ont pas atteint grâce à la banderole. Comme il s’avançait toujours en donnant des coups, j’ai lâché la banderole et je lui ai tourné le dos. Là, il m’a mis un coup de matraque sur la tête. Je suis tombée. Il a mis d’autres coups quand j’étais au sol. Des gens sont vite arrivés, j’ai pu me relever et là j’ai vu que ça saignait beaucoup. »
Cette manifestante est évacuée à l’hôpital, avec une large plaie sur le crane.
Des passants scandalisés interviennent. Un monsieur habillé en costume, sortant du magasin Decré, s’interpose devant un policier qui s’acharne à coups de matraque contre la jeune femme à terre.
Tout va très vite. Au même moment, un véhicule de la police municipale fonce à pleine vitesse dans un groupe de manifestants qui s’écartent au dernier moment, évitant de justesse de se faire écraser. En démarrant, la voiture avait déjà roulé sur une personne menottée allongée au sol. Le blessé sera évacué vers l’hôpital, inanimé.
La manifestation est explosée en plusieurs petits groupes. Certains retourneront sur la Place du Bouffay avant de se disperser. Bilan de la manifestation : au moins 2 blessés hospitalisés, des dizaines de personnes gazées, et 2 voire 3 personne interpellées. L’absence de journaliste explique probablement un tel défoulement.
Le défilé aura duré 10 minutes, et parcouru une centaine de mètres, avant de subir un déchainement de violence tout simplement hallucinant et inattendu. Personne n’avait anticipé la possibilité d’une telle agression policière.
Les effectifs policiers, commandés directement sur le terrain par le patron de la police nantaise, avaient clairement pour mission de briser toute bribe de résistance à l’État d’Urgence à Nantes.
Soyons nombreux et nombreuses samedi 12 décembre, Place du Bouffay, à 15H, contre la COP 21, l’Etat d’Urgence et les violences policières !