Voici quelques conseils, et quelques informations sur la manière dont on peut se défendre quand on est en garde-à-vue. On a souvent l’impression qu’on peut rien faire parce qu’on est pris dans les rouages de l’institution, mais en réalité une grande partie du fronctionnement de celle-ci repose sur notre collaboration.
Collaboration avec laquelle il est donc temps de rompre…
Souvent, quand on est arrêté, notre premier réflexe est de penser qu’on s’en sortira mieux si on collabore avec la police, le juge etc, en pensant que s’ils ont de la sympathie pour nous, cela nous aidera.
La première chose à se mettre en tête, c’est que le processus d’une garde-à-vue est essentiellement bureaucratique. ce qui nous fait face, ce n’est pas des personnes avec qui dialoguer (ou même insulter), c’est une administration. Elle relève de mécanismes juridiques dans lesquels « la sympathie » n’existe pas.
L’échange avec un flic vise à remplir des dossiers qui seront transmis au procureur qui décidera de ton sort. C’est-à-dire à remplir des cases, et non pas à savoir si t’as l’air sympa ou honnête.
Le principe de la garde-à-vue, c’est de constituer un dossier contre toi.
En gros, un flic te soupçonne d’une infraction, et le but de la garde-à-vue c’est de coder en langue juridique ce qu’il a vu, ce qu’il soupçonne que tu aies fait, pour en faire un délit, une infraction.
Exemple : tu es trouvé à côté d’un tag fraichement réalisé, et tu as une bombe de peinture dans la poche.
La garde-à-vue, c’est le moment où on va constituer le dossier qui permettra aux flics de t’emmener devant un tribunal. Parce qu’avoir une bombe dans la poche n’est pas en soi répréhensible. Ce qu’ils cherchent, ce sont donc des aveux – meilleure preuve de ta culpabilité – ou des éléments qui leur permettra de faire peser le soupçon sur toi – des informations contradictoires, absurdes, etc.
Techniquement : comment ça se déroule ?
Ça commence dès qu’on te le dit, et un flic doit alors t’annoncer l’heure et te dire que tu es mis en garde-à-vue.
Un Officier de Police Judiciaire doit faire un PV de début de garde-à-vue, tu passes devant lui et il te notifie ta garde-à-vue : il te rappelle l’infraction que tu es soupçonné avoir commis, la durée de ta garde-à-vue, et t’énonces tes droits (voir un avocat, voir un médecin, avoir un interprète, avertir quelqu’un que tu es en garde-à-vue, avertir le procureur de la république). Il te demande à chaque fois si tu veux en user.
Demander à voir le médecin, c’est pas mal parce que ça permet d’attester que tu ne portes pas de coups en entrant en garde-à-vue. Ce qui permettra de prouver que tous coups constatés après ont été reçu en garde-à-vue, au cas où tu reçoivent des coups. Et puis ça fait une petite sortie…
Pour l’avocat : C’est gratuit. Tu peux le choisir. Tu vas le voir 30 minutes, de manière confidentielle. En prendre un, ça permet d’avoir éventuellement des infos sur ta situation (qui est le procureur, est-ce qu’il est sévère, qu’est-ce qui se dit dans les couloirs,…). Tu peux lui demander conseil. Mais si tu ne le connais pas, il vaut mieux quand même rester méfiant, parce que dans pleins de cas les avocats ne comprennent pas la stratégie que tu pourrais vouloir mettre en œuvre (comme ne pas donner tes empreintes, ou ne pas dire ton nom), parce qu’il souhaitera que tu respectes la loi. Mais dans tous les cas, tu peux t’en servir comme fiche technique, lui demander des trucs précis sur la loi, sur ce que tu risques.
Avertir le procureur de la république : ça sert pas à grand chose, mais tu peux leur demander de le faire, ça les emmerde et leur fait perdre du temps.
Une fois que tu as vu ton avocat, tu passes en audition avec un Officier de Police Judiciaire qui va te poser des questions sur ta situation personnelle et sur les faits. Le mieux c’est de refuser de lui répondre en déclarant « je ne veux rien déclarer ». Il ne peut pas t’obliger à répondre.
Quelque soit le délit que l’on te soupçonne d’avoir commis, il est presque automatique aujourd’hui qu’on te demande tes empreintes, voir même ton adn (réservé malgré tout normalement à une liste de délit spécifique). Refuser de les donner est un délit, mais c’est possible de le faire.
… On attend la Boite à Outils sur les empreintes et l’adn !
Le reste du temps, t’es en cellule.
À Suquet, y’a 8 cellules, plus ou moins grandes. Quand elles sont toutes remplies, ils mettent plusieurs personne par cellule. Y’a des espèce de matelas en plastique, pas super confortables et des couvertures. C’est quand même largement possible de dormir tranquille. [avant de les faire chier, faut vérifier qu’on a bien des couvertures, parce que c’est plus dur à réclamer après les avoir insulté…]
Globalement, faut pas hésiter à les faire chier.
Quand ils te fouillent avant de rentrer en cellule, ils te prennent tes lacets, tes cordons, etc. Tu leur file les affaires que tu veux ou peux pas emmener en cellule. Prends un bon pull parce que ça caille dans les caves de Suquet !
Tu peux refuser de signer tout ce qu’ils te demandent de signer. C’est pas mal pour contester après, ou au moins pour leur signifier qu’ils peuvent pas te faire faire tout ce qu’ils souhaitent.
Après, tu peux toujours faire des dessins dans l’angle mort de la caméra qui te surveillent. C’est pas le gros kiff, mais ça passe un peu le temps.
Si tu constates qu’un de tes droits n’a pas été respecté, et qu’il y a donc un vice de procédure, le mieux c’est de ne rien dire sur le moment, pour éviter qu’ils le corrigent. Comme ça, tu pourra utiliser ce vice de forme plus tard, pour faire annuler les poursuites.
Normalement la garde-à-vue c’est 24h au maximum. En fait, les flics envoient au procureur de la république le dossier qu’ils ont réussis à constituer sur toi et ce qu’ils te soupçonnent d’avoir fait. À partir de ce dossier, le procureur décide de ce qu’il fait de toi. Soit t’es libéré parce que les pièces ne suffisent pas à justifier des poursuites, soit t’es libéré parce que t’aura des poursuites mais que pour le moment ils ont plus rien à te demander, soit ils te gardent 24h de plus parce qu’ils veulent te réinterroger.
Dans le cas de procédure anti-terroriste, ta garde-à-vue peut encore être prolongée, pour aller jusqu’à 96h.
Se taire
Bien sur, il est toujours possible de se sortir de garde-à-vue grâce à un beau mensonge. Mais ne sachant pas les informations détenues par les flics, il est difficile de mettre au point un mensonge dont on peut être complètement sur.
Du coup, la stratégie qui reste la plus gagnante, c’est le silence ! C’est, à coup sur, la stratégie qui te permet de ne pas aggraver ton cas.
La plupart des procès repose entièrement sur les déclarations de l’accusé en garde-à-vue. Les seuls trucs que t’es obligé de dire c’est ton nom, ton prénom, ton lieu et date de naissance. Ton adresse.
Ne pas répondre à ces questions-là, c’est une infraction. Mais dans certains cas, tu peux mentir. Par exemple dire que tu es sdf pour ne pas donner d’adresse.
C’est le procureur qui décide de ce qu’il va t’arriver à partir des papiers administratifs que les flics ont rempli. S’il n’a pas d’informations, il ne peut pas trouver de justifications pour te poursuivre. L’enjeu n’est pas d’être sympa avec les flics, mais de ne pas lui donner d’infos.
Si c’est trop dur de juste ne rien dire, tu peux justifier ton silence en disant que tu trouves ta présence en garde-à-vue inadmissible, et que tu refuses de collaborer de quelques manières que ce soit.
Liens, contacts
Un article d’un avocat qui explique pourquoi c’est mieux de se taire en garde-à-vue : Les experts de la garde-à-vue – Maître Eolas
Le gros topo « Face à la police, face à la justice », qu’est vraiment bien : Face à la police, Face à la justice
Et sinon, y’a toujours moyen de contacter la caisse de solidarité contre la répression de Dijon.
Soit à caisse-de-solidarite@brassicanigra.org
Soit au 07 50 18 13 21 (faut laisser un message, ou un sms et ils rappellent plus tard).